Quelques réflexions sur cette info:
La
Ligue de Défense des Conducteurs nous informe d'un énième scandale politico-financier...
Les législateurs français
se seraient-ils empressés de voter une loi imposant d'embarquer un
éthylotest dans chaque véhicule pour faire prospérer les affaires de la
société française
CONTRALCO ?
Mais encore une fois, ces révélateurs des vérités cachées nous
disent-ils toute la vérité et rien que la vérité ? Reprenons point par
point l'argumentaire de Christiane BAYARD.
- Un décret rend obligatoire l'éthylotest dans les voitures : vrai.C'est effectivement l'objet du décret 2012-284 du 28 février 2012.
- Une mesure adoptée précipitamment : faux.Peut-on raisonnablement parler de décision précipitée quand on sait
que la présence de cet ustensile à l'intérieur de nos véhicules est
prévue par l'article L234-14 du Code de la Route
qui date de 1970 (Loi n°70-597 du 9 juillet 1970). En fait, cet article
n'avait jamais été mis en oeuvre faute d'un décret d'application qui
aura donc attendu 42 ans avant de paraître.
- I-TEST, association de fabricants d'éthylotests : vrai.La lecture des statuts de l'association
ne l'indique pas clairement mais une recherche sur le nom des membres
fait apparaître qu'ils sont tous en relation avec des systèmes de mesure
de l'alcoolémie. Outre CONTRALCO, on trouve des représentants de
ALCOLOCK FRANCE, de LANDSKRON HOLDING qui possède ETHYLO, de PELIMEX SA
et d'un importateur : OBJECTIF PREVENTION. Il est clair à la lecture de
cette liste que nous ne sommes pas là en présence d'une association qui
agirait de manière totalement désintéressée et qu'il s'agit
indubitablement d'un groupe à vocation lobbyiste !
- I-TEST se crée pour militer en faveur d'éthylotests obligatoires dans toutes les voitures : faux.L'objet social d'I-TESTS est, en réalité, "
contribuer fortement à
la prévention et à la prise de conscience en favorisant le
développement de la mise à disposition des systèmes de dépistages, de
mesurage et d’auto-dépistage de l’alcool et des drogues pour tous en
tous lieux et à toute heure". Un tel objet social explique la
présence en son sein de fabricants de bornes électroniques qui, eux,
n'auraient rien à gagner à la présence d'éthylotests chimiques dans les
voitures.
- Le président d'I-TEST travaille pour CONTRALCO : vrai.C'est écrit en toutes lettres dans les statuts de l'association : "
Chargé de Mission au sein de l’entreprise Française experte Contralco".
- CONTRALCO s'assure 100 % du marché : faux.CONTRALCO est le leader mondial de l'éthylotest chimique donc, de fait, le principal bénéficiaire de cette mesure.
Mais prétendre qu'il en est le seul bénéficiaire c'est oublier que
son principal concurrent, le sud-africain Red-Line Products, dispose
aussi de la norme NF et qu'il bénéficiera lui aussi de cette manne.
C'est aussi oublier qu'une part non négligeable d'automobilistes devrait
investir dans un appareil électronique, ce qui diminuera la part de
marché du "ballon".
50% vrai, 50% faux : 100% orienté ! Comme on le voit, si certains arguments sont incontestablement vrais,
d'autres sont clairement faux. Alors, pourquoi ce message ?
La suite du discours nous en dit peut-être un peu plus. En effet,
après la dénonciation de ce "scandale" suit une diatribe anti-radars
décomplexée. Un discours très proche de celui du M.A.R.
, mouvement populiste brossant dans le sens du poil le pauvre
automobiliste victime de l'inadmissible répression policière. Discours
anti-radars qu'on retrouve aussi dans un autre texte
où, paradoxalement, cette même Ligue de Défense de Conducteurs, qui
s'oppose à l'éthylotest obligatoire, considérait l'ivresse au volant
comme une des principales causes d'accidents contre laquelle il fallait
lutter.
Ligue, association ou lobbying ? Mais au fait, qu'est-ce que cette
Ligue ?
Tout d'abord, les recherches sur le Journal Officiel des Associations ne donnent aucun résultat sur ce nom mais débouchent systématiquement sur la Ligue de Défense des Citoyens
utilisant le même sigle et dont le siège est au 116 rue de Charenton,
dans le 12ème arrondissement de Paris, une des deux adresses de la Ligue de Défense des Conducteurs,
l'autre étant celle où figure dans l'annuaire (avec un numéro
différent), là encore, la Ligue de Défense des Citoyens. Même sigles,
mêmes adresses, de toute évidence il s'agit de la même structure.
Voyons plus loin... Une recherche dans l'annuaire n'indique aucune
LDC rue de Charenton au milieu de la multitude d'entreprises qui y ont
établi leur siège social par le biais d'une société de domiciliation
commerciale. Et pourquoi utiliser les services d'une telle société alors
que les comptes 2010 de l'association font apparaître 34.000 € pour la rémunération de personnel (page 5) ?
Qui sont ces salariés ? Que font-ils ?
"Donnez, nous en ferons bon usage !" Cette même année 2010, Christiane BAYARD, revendiquait 70 000 membres et sympathisants
mais, étrangement, le site de l'association ne dit nulle part comment
devenir membre ni le prix de la cotisation. Tout ce qu'on vous propose
c'est de faire un don de 10 à 100€.
Don qui, est-il besoin de la préciser, ne fait pas de vous un membre
actif et ne vous donne donc pas droit de vote en assemblée générale ni
droit de regard sur l'utilisation des dons. Ceci appelle donc une autre
question : qui sont les membres ?
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il existe autour de cette
association de nombreuses zones d'ombres qui seraient propices à la
dissimulation d'un parti politique contestataire ou de puissants lobbies
tels que ceux de l'industrie automobile ou des distributeurs de
boissons alcoolisées.
Enfin, on notera que si la Ligue pour la Défense des Conducteurs
s'oppose (avec des arguments douteux) à l'obligation de détention d'un
éthylotest par les automobilistes, une autre association qui œuvre dans le même domaine soutient cette décision et y participe même activement. Les avis semblent donc très partagés sur l'intérêt de cette mesure dont seul l'avenir révèlera la réelle efficacité.