le confinement dans les campings au Maroc avril 2020

Dimanche, le départ ! Le temps est beau, mais la pluie est annoncée, c’est le moment d’entreprendre la transhumance d’automne.

Première étape, arrivée au pied des Pyrénées, une nuit de repos avant de les franchir. A l’aube, nous empruntons la vallée d’Aspe, une pensée pour les écologistes qui se sont battus pour protéger ce lieu privilégié. La route serpente, taillée dans les rochers, l’idée qu’une multitude de camions pourrait un jour l’envahir est insupportable.

Le brouillard enveloppe les sommets, la brume s’est répandue et bien que le jour se lève, l’obscurité est importante. Nous avançons prudemment et au sommet nous entrons dans le tunnel du Somport, ouvert récemment.

Après six kilomètres, le jour apparaît à l’autre bout, nous voici en Espagne !

Le brouillard est  resté sur l’autre versant et ici le soleil brille déjà.

Nous descendons la chaîne cantabrique et nous dirigeons vers des hauts plateaux. Les amandiers ont souffert de la canicule mais leurs branches ploient sous les fruits.

La traversée de la péninsule est un véritable cours de géographie :

Ici un parc d’éoliennes nous signale une région ventée, là des fumées d’usine, la banlieue d’une ville industrielle.

Les noms connus défilent : Saragosse, Madrid la capitale, enveloppée comme presque toujours d’un nuage de pollution.

L’homme est un grand architecte de la nature, il la taille et l’entaille au gré de ses besoins. Nous ne verrons de cette grande métropole que des routes qui se croisent et s’entrecroisent. Continuellement en chantier pour satisfaire la progression de la circulation automobile, nous côtoyons des monstres à six roues, aux mâchoires puissantes qui mordent la roche et crachent la poussière. Des effluves  de  goudron, de terre chaude et de gaz oïl parfument l’air ambiant.

Revoilà la campagne, Aranjuez se profile à l’horizon. Son concerto résonne à nos oreilles tandis que nous traversons la place du «  palais d’el Rey ». Nous nous accordons une nuit de repos avant d’affronter la chaleur de l’Andalousie.

Tôt le matin, dans la fraîcheur de l’aube, nous quittons la cité des lions.

Des hectares de blé puis de vigne   font la richesse de la Meseta, le grand plateau de Castille, mais très vite nous entrons dans le royaume de l’olivier.

A perte de vue sur les flancs de montagne et même sur les sommets, il colonise la région.
Une odeur persistante et peu appétissante flotte dans l’air, elle annonce les fabriques d’huile.
Une chanson trotte dans ma tête, « aceitunas de Jaen … » chantait Paco Ibanez dans les années soixante dix, dénonçant les rudes conditions de travail des paysans ibériques. La mécanisation a, certes, amélioré cela en partie.
Grenade, entourée par l’imposante barrière rocheuse de la Sierra Nevada, ici l’Europe et l’Afrique ont mêlé leur art et leur culture, l’Alhambra en est la preuve.
Attirés toujours plus au sud, nous descendons vers la Méditerranée.
A droite, Tarifa, la ville la plus ventée d’Europe et la capitale des véliplanchistes, à gauche la « Costa del sol », rendez-vous mondain international, souvent défigurée par les promoteurs immobiliers.
 
Une bande bleue à l’horizon, nous sommes aux confins du vieux continent, Algésiras, ville de transit, le rocher de Gibraltar, dernier bastion britannique, gardien du détroit, et là-bas, dans la brume un autre monde.

 
 Traversée calme en compagnie des dauphins, nous foulons encore la terre espagnole dans l’enclave de Ceuta.

Bienvenue, vous êtes les bienvenus !
 
Quel accueil !
Police des frontières, douaniers, tout le monde nous souhaite un bon séjour dans le pays !

L’entrée dans le pays se fait dans la bonne humeur et déjà le dépaysement est perceptible. Un homme s’approche pour nous aider dans nos démarches, son badge signale : écrivain public. Il nous rappelle que 50% de la population est illettrée.
A partir de maintenant, il nous faut réagir différemment.
La civilisation est autre, notre jugement doit en tenir compte.

 
Beaucoup de situations, de réactions pourront nous surprendre, il nous faut rester neutre et ne pas intervenir.
Premiers chocs pour le nouvel arrivant, les conditions d’hygiène, les odeurs, la pollution
Ramassages des ordures, connaît pas, les villages sont la plupart du temps sans eau courante, sans électricité et sans égouts ! (Nous sommes en 2003 mais depuis les villages ont presque tous étaient électrifiés et de gros progrès ont été réalisés)
Une voiture nous double et lâche un nuage noir telle une pieuvre par souci de camouflage, puis s’éloigne en pétaradant.
Le paysage méditerranéen de pins parasols, fait place aux forêts d’eucalyptus dès que l’on rejoint la côte atlantique

Rabat, Casablanca, Marrakech…
 
 
La cité impériale, la perle du sud, au pied du haut atlas, est une des villes les plus visitées. Des vergers de pêchers, d’orangers, bénéficient des eaux des hauts plateaux.
Cap à l’ouest, nous franchissons les monts de l’Atlas, et nous dirigeons vers Agadir.
Capitale du Sous, mais surtout destination touristique grâce à sa baie, protégée des vagues et à sa plage, c’est une ville moderne, récente.
Sur la colline, de la vieille ville, détruite en 1960 par un terrible tremblement de terre, il ne reste que des vestiges du mur d’enceinte.
Au pied s’étalent les hôtels de luxe.
Premier port de pêche du pays, il suffit de se fier à son nez pour trouver le chemin du port !
Nous ne sommes pas venus profiter des 300 jours annoncés sur les panneaux publicitaires mais nous comprenons que l’on veuille profiter de ce climat de rêve !


 
Qui n’a jamais rêvé d’aller vers le grand sud ?
 
Suivre la route des caravanes qui, chargées d’épices, d’or parfois et quelquefois d’esclaves, remontaient du Niger, traversaient la Mauritanie pour accéder à ces provinces du sud, marocaines depuis la Marche verte.
Marcher dans les pas de Saint Exupéry à Cap Juby, fouler le sable à la recherche du Petit Prince, se contenter de l’essentiel, car ici le superflu n’existe pas !

Le Sahara n’offre à perte de vue qu’une grève caillouteuse, un paysage où toute vie végétale semble exclue. C’est à peine si de temps en temps, quelques buissons épineux, croissent contre les rochers. Ils font le bonheur des troupeaux de dromadaires.


Ici le désert est atténué par la frange littorale et le plateau rocailleux est soudain entaillé par le lit d’un oued.
Venu des lointaines montagnes de l’Atlas, il s’enfonce parfois dans le sable pour ressurgir plus loin et poursuivre sa quête de la mer.
Le flux et le reflux érigent souvent une barrière de sable, coupant cette rivière de son but ultime.
Il s’étale et la lagune ainsi formée, devient paradis pour les oiseaux marins.
Flamands roses, hérons, y font une halte sur le chemin de leur migration. Les goélands, les mouettes, y cherchent pitance.

 
La route des caravanes était marquée de puits, celle des nouveaux nomades est un long ruban goudronné, l’eau toujours nécessaire mais l’essence indispensable pour avancer.
Le dromadaire n’est plus qu’un élément du troupeau destiné à la boucherie, les quatre quatre les ont   remplacés pour les courts trajets, et les camions transportent du Nord au Sud le ravitaillement, et du Sud au Nord la production des provinces sahariennes.
Les oasis sont devenues stations service et autour d’elles se développe et s’organise le commerce des nécessités.

Un village se crée
 Dès le mois d’octobre, les camping-cars arrivent. Le bouche à oreille a bien fonctionné. On amène ses amis, puis les amis de ses amis…

 Aziz, le gardien !

 
Bienvenue au Maroc !
Sourire aux lèvres, Aziz nous accueille.
-       Tu viens d’où ? Tu es déjà venu ?
-       Oui, il y a deux ans, tu te souviens ?
-       C’est vrai, tu étais là-bas avec les chiens ! Bienvenue, tu te mets là ?
Il donne des nouvelles de ceux qui sont déjà passés, de ceux qui doivent arriver.
Après les nécessaires informations pratiques, les renseignements indispensables au moral du nouvel arrivant !
-       La semaine dernière, André a pris un bar de quatre kilos ! Il y a quinze jours, les courbines étaient là, il y a eu un orage, l’eau est marron et depuis plus rien il faut patienter.
-       Inch Allah que le poisson revienne !
-       Dis-moi et la sardine pour pêcher ? Tu peux avoir de la sardine ?
-       Oui, je téléphone à un ami, demain Inch Allah, il te porte la sardine.
Ne jamais dire non, cela fait partie de l’hospitalité marocaine, ne rien refuser, mais s’en remettre à la volonté divine pour la réalisation des dites promesses !


Une  nouvelle saison dans ce fabuleux pays commence!